Contribution CG78
Contribution de l’Association “FLINS SANS CIRCUIT F1″
Pour un développement harmonieux de la vallée de la Seine
Fait le 15 juin 2009 / H. Danel Présidente & M. Plagne Vice président
Présentation :
“Flins sans circuit F1? est une association apolitique, non religieuse et qui ne prône aucune forme d’idéologie. Elle fédère de nombreux citoyens de tous horizons, des personnalités publiques et morales avec le soutien de la plupart des ONG. Elle a pour objet la protection et la sauvegarde de l’environnement naturel des Yvelines et plus particulièrement de la vallée de la Seine, notamment par la promotion de l’agriculture biologique et par conséquent le retrait du projet d’implantation d’un circuit automobile sur les communes de Flins et Les Mureaux.
Pourquoi sommes nous opposés au projet de construction d’un circuit F1 :
Il ne nous appartient pas de juger de l’opportunité d’un grand prix de France de Formule 1 mais le choix du site de Flins - Les Mureaux pour implanter un énième circuit français est bien le pire de ce qui pouvait être imaginé. La proximité de Paris pour satisfaire les magnats de la Formule 1 n’autorise pas les pouvoirs publics à faire n’importe quoi surtout en période de crise.
Sur le plan environnemental : Ce serait un symbole contraire dans un pays qui se veut à la pointe du combat environnemental, déclarait Nicolas Hulot. Un chantier au détriment d’un captage d’eau stratégique pour l’Ile-de-France et de terres destinées à une agriculture bio de proximité alors que dans notre région nous manquons déjà cruellement de terres pour l’alimentation des Franciliens.
Tous les 10 ans en France c’est l’équivalent d’un département qui cède à l’artificialisation. La F1 est une activité qui est loin d’être essentielle, un hymne à la vitesse, une addiction dont il faut qu’on se débarrasse, ajoutait-il en évoquant l’après pétrole. Dans notre département, toutes les terres agricoles devaient y être sanctuarisées (c’était pourtant un objectif du SDADEY précisément à cet endroit) comme sur l’autre rive de la Seine avec le Parc Naturel Régional du Vexin.
Sur le plan économique, il est faux de croire qu’un circuit de F1 aussi prestigieux soit-il puisse être un produit d’appel à l’investissement. Aucune étude ne corrobore ce fait et l’expérience française nous ramène à cette cruelle vérité quand elle fait appel au contribuable pour combler les déficits récurrents (7 M€ à Magny-Cours). Où est le business-plan qui doit démontrer la viabilité économique du circuit ? En pleine crise financière, que penserait une banque si elle était invitée à financer ce projet sans aide publique? Le dossier de concertation explique sans précision que la gestion du circuit fera l’objet d’une délégation de service public, comme si la F1 devenait un besoin de première nécessité dans la période difficile que nous vivons.
Quant à l’aspect démocratique, et contrairement à ce qui est écrit, il n’y a jamais eu d’unanimité sur ce projet de circuit F1. La candidature des Yvelines au grand prix 2011 n’a pas fait l’objet d’une délibération mais seulement d’une communication du président à la séance du 26 septembre 2008. Certes, le plan de soutien à l’industrie automobile a bien été voté à l’unanimité le 12 mars 2009 mais à l’exception de la délibération qui porte justement sur la construction du circuit. Les maires qui soutiennent ce projet le font généralement à titre personnel sans être soutenus par un vote de leur conseil municipal, pas même à Flins ni Les Mureaux qui sont pourtant concernés au premier chef. Par contre il s’avère qu’à ce jour 6 communes proches du site ont exprimé leur opposition par un vote négatif de leur conseil municipal. Sur le site internet Yvelines F1 dédié au circuit tous les avis négatifs ont été retirés. Aucun des comités de soutien n’a organisé de réunion publique d’information et tous les sondages effectués sont invariablement contre le projet de circuit à l’exception du premier effectué début février par le Conseil général auprès de 601 Yvelinois.
Un projet hors la loi :
La France dispose d’un arsenal de procédures et de mesures règlementaires qui devraient normalement nous protéger d’une telle aberration. C’est d’extrême justesse qu’en janvier a été repoussé l’amendement scélérat proposé sous forme de cavalier législatif par 4 sénateurs hors Yvelines et dont le but inavoué était de contourner ces contraintes opposables à tous à l’exception peut être du Conseil Général des Yvelines. Par la suite, Le ministre de l’Ecologie et la secrétaire d’Etat en charge de ce dossier nous ont assuré qu’il n’y aurait pas de procédure d’exception, par conséquent toutes les procédures devront être respectées. Nous y veillerons scrupuleusement.
Un chantier entamé au mépris de toutes les autorisations et sans étude d’impact préalable :
Les fouilles d’archéologie préventive ne sont qu’un prétexte pour faire croire que toutes les décisions sont prises en faveur du site de Flins-Les Mureaux mais à ce jour il n’en est rien. Aucune autorisation d’urbanisme n’a été donnée, l’étude d’impact environnemental n’est pas achevée et les travaux entrepris avant d’établir l’état initial du site sont contraires à la loi. Fort heureusement “Flins sans circuit F1? est intervenue pour que soit prise en compte la présence d’espèces protégées dont l’OEdicnème criard qui figure en liste rouge en France et en Europe ce qui justifierait le classement du site en zone Natura 2000 avant leur totale destruction.
Un projet contraire aux orientations du SDRIF :
Le Schéma Directeur de la Région IdF (SDRIF) prévoit que cette zone permette d’assurer un rôle de couloir vert favorisant d’une part la biodiversité entre la plaine de Bouafle et les coteaux de Mézy et d’autre part une coupure d’urbanisation sur la Seine entre Flins et les Mureaux. Il confirme que ce territoire doit conserver sa vocation agricole et son rôle de poumon vert en Seine aval.
Un projet contraire au protocole de l’OIN Seine Aval :
Le site convoité n’est pas dans les périmètres d’intervention de l’OIN. Sa vocation agricole est confirmée. La Région IdF soutient les projets d’agriculture biologique sur ce site et l’Agence des Espaces Verts a porté le foncier. Ce grand projet d’agriculture biologique d’Ile-de-France a mobilisé l’ensemble des organisations professionnelles agricoles : SAFER, expertise agronomique de la chambre d’agriculture, accompagnement des projets par le Groupement des Agriculteurs Biologiques, les AMAP, Terre de Liens etc…
Un projet contraire au Schéma Directeur d’Aménagement et de Gestion des Eaux (SDAGE 2015) :
Le SDAGE s’impose aux décisions de l’Etat en matière de police des eaux, notamment des déclarations d’autorisations administratives comme celles de l’urbanisme. Sur le bassin Seine Normandie, il préconise de focaliser en priorité les actions sur les bassins d’alimentation de captage d’eau souterraine destinée à la consommation humaine. Le projet est en contradiction totale avec les orientations qui visent à la maîtrise des sols (défi 5, disposition 40).
Un projet contraire aux prescriptions de la DUP qui protège le champ captant de Flins-Aubergenville :
Ce projet menace gravement la nappe phréatique qui alimente plus de 500 000 Franciliens en eau potable. Pire encore, il nécessiterait le déplacement de 6 des 37 puits de captage dont 2 sont toujours propriété de la ville de Paris qui a manifesté son inquiétude par un vote en Conseil de Paris et par une lettre ouverte au Préfet de région. Déjà les fouilles d’archéologie préventive ne respectent pas les périmètres de protection. Une procédure de déclaration est déposée pour réaliser 15 nouveaux forages afin de retrouver un débit équivalent aux 6 captages supprimés ou déplacés. Au-delà des surfaces agricoles déjà détournées, ces nouveaux forages et leurs réseaux de jonction amputeraient encore l’espace agricole y compris sur les communes voisines mais plus encore sur celles réservées aux 2 seuls exploitants bio restants dont l’avenir est plus qu’incertain. Et qu’adviendra-t-il si au terme des 15 forages il n’est pas trouvé de débit compensatoire suffisant ?
Un projet contraire aux prescriptions du Plan de Prévention des Risques d’Inondation (PPRI du 30 juin 2007):
Ce projet se situe pour partie en zone verte d’expansion des crues où toute forme d’urbanisation est interdite. Nous pensons ici aux recours sans suites des nombreux particuliers riverains de la Seine qui s’estiment spoliés par ces mesures. De quel droit le Conseil Général passerait-il outre ces dispositions ? Ce projet porte le double inconvénient de reporter la zone d’expansion d’une crue type 1910 dans les zones urbanisées voisines mettant en danger les populations concernées, et le risque de voir endommager les installations du circuit dont le coût d’exploitation serait augmenté d’autant.
Un projet incompatible avec le règlement des Plans Locaux d’Urbanisme (PLU) :
En l’état actuel ces règles d’urbanisme ne permettent pas d’autoriser ce projet à cet endroit. Leur modification serait donc nécessaire mais elle se heurterait aux dispositions qui prévalent en particulier SDAGE, SDRIF et PPRI. Nous touchons bien là à l’inadmissible qui consiste à dire que ce projet n’a d’espoir d’être réalisé que s’il est hors la loi.
L’étanchéité de la nappe, une hérésie :
Non seulement ce serait largement préjudiciable à son alimentation et à la qualité de l’eau, mais imperméabiliser 100 ha de terrain relève de l’utopie. Non seulement trouver une membrane étanche de cette taille est impossible mais sa mise en oeuvre dépasse l’idée même d’une prouesse. Imaginer décaisser 100ha sur 2,50m de profondeur, avec le foisonnement des terres on atteint les 8 Millions de m3 de déblais qu’il faut retirer si on respecte les obligations du PPRI. Encore faut-il trouver un endroit pour déposer ces remblais et les transporter sans nuisances est impossible.
Pour qui les nuisances :
Comment passer sous silence les problèmes de bruit et ceux de la F1 en particulier où toutes les protections s’avèrent inefficaces (voir la note de synthèse de Bruitparif). Vivre à coté d’un circuit F1 c’est comme vivre au bord d’une piste d’un grand aéroport surtout qu’une utilisation toute l’année s’impose avec d’autres manifestations pour réduire les déficits d’exploitation. Des nuisances garanties toute l’année avec pour corollaire une dévaluation immobilière proportionnelle à leurs niveaux. Si la question n’était pas aussi grave l’habillage HQE du projet pourrait porter à sourire mais nous avons recensé plus de 150 établissements sensibles dans un rayon de 7kms dont une majorité d’établissements scolaires et une trentaine d’établissements de soins (à Magny-Cours un lycée a dû être déplacé). Par ailleurs, va-t-on ajouter de la congestion à un réseau routier déjà largement saturé, et que penser de la pollution atmosphérique en zone urbaine dense, du bilan carbone, des nécessaires économies d’énergie ?
L’emploi, mythe ou réalité ?
Plus qu’un doute nous avons la certitude qu’il n’y a pas à attendre de retour sur investissement d’un tel projet. Les faits sont têtus et l’expérience de Magny-Cours nous apprend que 425 emplois (directs et indirects) seulement ont été créés ; ils risquent d’être détruits là bas. A l’exception des quelques centaines d’emplois précaires nécessaires à sa construction, ce projet n’apportera aucune solution à la crise du secteur automobile. Les moyens mobilisés pour ce circuit pourraient profiter à la nécessaire restructuration de la filière automobile avant que le circuit ne consomme la totalité des budgets alloués à son plan de soutien. En matière de recherche et développement, nul besoin d’un circuit sale pour développer un véhicule propre. Depuis longtemps déjà il n’existe plus de lien entre la recherche automobile et la F1. Renault a d’ailleurs précisé que les emplois sur le site de Flins étaient totalement indépendants du circuit. En outre il est peut-être souhaitable de diversifier davantage l’activité économique de la vallée de Seine plutôt que de la renforcer sur une mono-industrie qui fait sa faiblesse d’aujourd’hui. Enfin, les CDAC font régulièrement le constat d’une saturation de cette zone de chalandise, la CCI et la chambre des métiers qui avaient réservé leur accord d’implantation du Family village ne s’y étaient pas trompées puisque certaines enseignes menacent de fermeture un an à peine après l’ouverture.
Conclusion :
Ce projet de circuit de formule 1 élaboré sans concertation ni transparence est la caricature d’un projet économique dépassé et la caricature d’une négation des engagements du Grenelle de l’environnement. La crise ne doit pas servir d’alibi pour ne pas respecter ces engagements. Alors que les Français sont invités à se serrer la ceinture, ces dépenses somptuaires aux conséquences défavorables et irréversibles pour l’environnement seraient une véritable provocation.
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